Une table de chêne finement vernie, des fauteuils délicieusement molletonnés, des coussins brodés de couleurs vives et de doux motifs. Sur la table, deux soucoupes de porcelaine - sur ces soucoupes, des tasses qui s'y posent en cliquetant. De la vapeur s'élève du thé bien chaud et une domestique s'efface silencieusement derrière la porte en tirant le petit chariot à thé dont les roues grincent faiblement.
- Permettez-moi encore de vous remercier d'avoir accepté mon invitation, Mademoiselle di Cavallieri. Ce n'est pas tous les jours que nous autres nobles pouvons profiter d'un simple moment à prendre le thé, et c'est bien dommage, fait Yolande d'une voix aimable en posant sur son invitée un regard presque maternel.
"Il en va de soi ! La bibliothèque est ouverte à quiconque souhaite s'y instruire et à ceux qui ont le droit d'y enseigner - un droit que vous venez d'acquérir, ma chère."
Les professeurs de la bibliothèque n'étaient pas n'importe qui, et malgré la liberté intellectuelle que les de Longroy prônaient, ils étaient surveillés de près. La poignée d'enseignants représentait bien plus que des employés; ils étaient les lumières dans l'ombre, les murmures de connaissance dans le brouhaha d'ignares qui peuplait Paris. Presque une armée cachée. Ou, en tout cas, des puissants et des influenceurs qui se rangeaient tous du côté des de Longroy. Et la Douce venait, à moindre mesure, de poser la première patte dans le cercle très fermé du Savoir de la ville.
-------------------
Fin du Rp; Yolande et Beata continuent de prendre le thé en discutant plaisamment. L'art de la conversation et des bonnes manières est un art partagé des deux nobles dames; et voici qu'elles se lient d'une amitié sincère. Maternelle, Yolande considère presque la demoiselle comme sa fille - ou, en tout cas, une protégée. Les relations entre de Longroy et Pastore risquent de s'améliorer si la Douce les rejoint. Ou, au contraire, si elle y est mal traitée... elles risquent de sérieusement se dégrader.
Yolande s'était montrée rassurante et la plus jeune était soulagée de voir qu'elle ne s'était pas trahie.
"Et c'est déjà beaucoup. Beaucoup plus que ce dont sont capables la plupart des habitants de notre capitale..., Beata avait feint de ne pas entendre le petit soupir de Yolande, En tout cas, je pense que nombre de mes étudiants seraient ravis d'en apprendre plus sur votre pays et l'art dont il recèle."
Le visage de la Douce s'était soudainement illuminé: l'art italien sonnait à ses oreilles comme la plus belle des mélodies.
"Et je serais enchantée de pouvoir parler de l'Italie et de ses peintres à qui souhaitera en apprendre d'avantage, elle avait prit une nouvelle gorgée de thé, Serait-il possible que je puisse visiter votre formidable bibliothèque un jour prochain ?"
Elle en avait entendu parler de nombreuses fois et l'idée de tant de livres, tant de savoir, rassemblés dans un même endroit l'enchantait bien plus que celle d'arpenter une fois encore les couloirs du Fort Pastore.
- Oh oui. J'ai toujours eu goûts aux études, mais je me passionne plus pour l'art. Ma mère était le mécène de nombreux peintres, c'est grâce à elle que j'y ai été initiée et.... et c'est tout.
A tort, Yolande prit son hésitation pour de la honte. Elle afficha un sourire sympathique et voulut rassurer son invitée.
- Et c'est déjà beaucoup. Beaucoup plus que ce dont sont capables la plupart des habitants de notre capitale...
Elle fit son possible pour ne montrer aucun dédain, mais ce fut difficile. Elle poussa un petit soupir, avant de vouloir changer de sujet.
- En tout cas, je pense que nombre de mes étudiants seraient ravis d'en apprendre plus sur votre pays et l'art dont il recèle.
Nouveau sourire.
Un bref échange avait eu lieu entre Yolande et son domestique:
"Miss Yselde est dans... sa chambre. Elle s'occupe des lapereaux que le père du moulin lui a donnés.
- Il serait malvenu de la déranger. Yselde est occupée par ses études, mais j'espère que vous aurez l'occasion de la croiser bientôt. Qu'en est-il de vous, ma chère ? Êtes-vous intéressée par un quelconque sujet ?
- Oh oui. J'ai toujours eu goûts aux études, mais je me passionne plus pour l'art. Ma mère était le mécène de nombreux peintres, c'est grâce à elle que j'y ai été initiée et.... elle avait marqué une pause, hésitant à terminer sa phrase, et c'est tout."
Elle n'avait pas osé révéler à Dame de Longroy que sa mère lui avait également appris l'art de la guérison par les plantes. Elle entendait d’épouvantables histoire sur des sorcières que l'on exécutait: si ses plantes pouvait la conduire à l'échafaud, alors plus jamais elle ne parlerait d'elles en public.
Yolande acquiesça doucement au discours de son invitée, ravie que la jeune Beata se sente mieux qu'auparavant. Paris avait dû lui sembler si étrange, si froid... autant par son climat météorologique que par son climat politique et social. La capitale, si belle de loin avec ses grandes tours gothiques, ne révélait le cloaque qu'elle était réellement qu'à ses résidents.
- Je serais enchantée de faire sa connaissance.
Et il en serait sûrement de même pour Yselde. Malgré son aveugle piété, la Douce ne manquait pas d'intelligence - un point que l'héritière de Longroy ne pourrait assurément pas ignorer. Loin des fastes de la Grande Bourgeoisie, des soirées mondaines et des promesses de mariage, Yselde préférait se plonger dans ses études - une vocation fort louable, mais qui commençait à faire craindre à Yolande que sa fille manquât d'amis.
Elle tendit le cou vers une porte - un domestique, anticipant sa demande, y apparut immédiatement. Les serviteurs de la maison de Longroy possédant le droit de parole (un droit rarissime pour des gens de leur position), il ne dut pas attendre la question qu'il connaissait déjà pour y répondre.
- Miss Yselde est dans... sa chambre. Elle s'occupe des lapereaux que le père du moulin lui a donnés.
Yolande fronça le museau et congédia son serviteur d'un mouvement de patte. Autrement dit, sa fille était occupée à disséquer des bestioles consanguines dans son laboratoire.
- Il serait malvenu de la déranger, fit-elle avec un sourire d'excuse à l'attention de Beata. Yselde est occupée par ses études, mais j'espère que vous aurez l'occasion de la croiser bientôt. Difficile, car Yselde sortait peu en dehors de la bibliothèque familiale. Qu'en est-il de vous, ma chère ? Êtes-vous intéressée par un quelconque sujet ?
"Il est vrai que votre situation aurait pu être pire. Les Pastore sont bons et ont un remarquable sens de l'hospitalité. J'espère qu'ils deviendront pour vous une véritable famille, si ce n'est pas déjà le cas. Mais il est bon d'ouvrir ses horizons. Peut-être aimeriez-vous passer du temps avec des demoiselles de votre âge... Avez-vous déjà rencontré ma fille aînée ?
- Les Pastore prennent grand soin de moi, je me sens déjà beaucoup plus à mon aise qu'à mon arrivée. J'ai d'ailleurs été discrète depuis les premiers temps et ne commence que depuis peu de temps à rencontrer la grande Bourgeoisie et la Noblesse de Paris. C'est pour cela que je n'ai pas eu le plaisir de la rencontrer. Je ne connais Demoiselle Yselde que de nom.
Les Pastore avaient en effet insisté pour que Beata retienne les noms des différents membres de chaque famille à son arrivée. Ainsi n'était-elle pas totalement étrangère à la haute société de la Cité.
"Je serais enchantée de faire sa connaissance."
- Oh... en effet. Ma vie à Venise me manque: j'y ai là-bas toutes les personnes qui me sont chères. Mais je n'ai pas vraiment le choix. Et puis au moins... je ne suis pas partie chez un certain Roy que nous connaissons.
Elle partage le rire de la demoiselle en y joignant le sien, savourant en même temps les bonnes manières dont elle faisait preuve. Voici que Beata, alors même qu'elle en avait l'occasion, refusait de s'épancher sur sa douleur et faisait fi de sa peine pour rester le plus plaisante possible. La preuve même que la belle maîtrisait l'art de la conversation à la perfection - les mauvaises langues qui la jugeaient trop timide et effacée pour savoir discuter pouvaient se taire ! Il n'en était rien.
- Il est vrai que votre situation aurait pu être pire. Les Pastore sont bons et ont un remarquable sens de l'hospitalité. J'espère qu'ils deviendront pour vous une véritable famille, si ce n'est pas déjà le cas. Pause de politesse, le temps de reprendre une gorgée. Mais il est bon d'ouvrir ses horizons. Peut-être aimeriez-vous passer du temps avec des demoiselles de votre âge... Avez-vous déjà rencontré ma fille aînée ?
"Et vous y serez toujours la bienvenue. Vous n'êtes d'ailleurs pas obligée de venir exclusivement pour des soins - soyez libre de venir simplement me rendre visite ou y prendre le thé."
Beata ne peut contenir un sourire enchanté à cette délicieuse invitation:
"Oh, ce serait avec plaisir ! Merci."
Yolande de Longroy était décidément source de joie pour la jeune Italienne, qui commençait à se dire qu'elle souhaiterait se faire de cette Dame une amie.
"Vous devez vous sentir bien seule ici, loin de votre pays. Ma pauvre enfant...
- Oh..., son sourire s'était effacé en un instant, en effet. Ma vie à Venise me manque: j'y ai là-bas toutes les personnes qui me sont chères. Elle avait marqué une légère pause, le temps de boire une gorgée de ce si doux thé, Mais je n'ai pas vraiment le choix. Et puis au moins..., avait-elle ajoutée dans un petit rire, je ne suis pas partie chez un certain Roy que nous connaissons.
Jamais Beata ne se serait permise telle attitude au sein du clan Pastore; cependant Dame Yolande dégageait cette douce aura qui rassurait la Douce, arrachée de ses origines et qui avait grandement besoin d'une telle présence.
- Je dois admettre que je n'aime pas ses... méthodes. Et la religion des uns ne doit pas être l'arme des autres. Je suis ravie de savoir que j'ai pu vous aider.
Yolande acquiesce doucement en prenant une gorgée de thé chaud. Elle ne tique pas à l'évocation du Créateur : si elle devait choisir, elle préférerait mille fois la piété aveugle mais honnête des Pastore et de leurs gens que les faux-semblants et la cruauté justifiée de l'Inquisition. Beata avait au moins la noblesse de poursuivre ses idéaux jusqu'au bout.
- Sieur de Montdargue semble avoir le sang chaud. Je ne voulais pas qu'il vous ennuie dans votre salon. J'ai d'ailleurs beaucoup aimé vos soins, votre réputation est tout à fait méritée !
Elle esquisse un nouveau sourire et remercie son invitée d'une douce inclinaison de la tête.
- Et vous y serez toujours la bienvenue. Vous n'êtes d'ailleurs pas obligée de venir exclusivement pour des soins - soyez libre de venir simplement me rendre visite ou y prendre le thé.
Une oisiveté que Yolande ne permettait pas à n'importe qui.
- Vous devez vous sentir bien seule ici, loin de votre pays. Ma pauvre enfant...
Et elle pose sur elle un regard bienveillant, mais triste. Beata était un véritable miroir, et Yolande n'aurait jamais pu s'imaginer quitter sa famille pour épouser un lointain bon parti à son âge. La Douce possédait le courage des jeunes promises, un courage malheureusement si souvent ignoré...
Dame de Longroy lui inspirait confiance et elle était ravie d'être ici, à boire le thé avec une compagnie des plus agréable.
"Vous m'avez fort impressionnée, l'autre jour dans mon salon. Vous n'êtes guère connue pour faire des remous, et voici que vous vous opposez soudain publiquement à l'héritier de Montdargue. Je dois aussi vous remercier pour cela : vous m'avez été d'une précieuse aide."
"Je dois admettre que je n'aime pas ses... méthodes. Et la religion des uns ne doit pas être l'arme des autres. Je suis ravie de savoir que j'ai pu vous aider."
Elle sentait une petite pointe de fierté en ayant appris qu'elle avait impressionné Dame Yolande, mais elle l'avait bien caché et continuait à lui sourire en toute amitié.
"Sieur de Montdargue semble avoir le sang chaud. Je ne voulais pas qu'il vous ennuie dans votre salon. J'ai d'ailleurs beaucoup aimé vos soins, votre réputation est tout à fait méritée !"
- C'est moi qui vous remercie Dame de Longroy. Votre demeure est charmante. Profitons donc de ce simple moment pour nous connaître d'avantage.
Douce, polie et aimable. Une jeune fille à marier, déjà noble portrait de l'épouse modèle - à la fois cultivée, plaisante, et qui sait tenir sa langue autant que sa posture. Yolande croit se revoir presque vingt ans plus tôt, juste avant d'épouser son tendre Milet, et voici qu'elle offre un sourire attendri à son invitée.
- Vous m'avez fort impressionnée, l'autre jour dans mon salon. Vous n'êtes guère connue pour faire des remous, et voici que vous vous opposez soudain publiquement à l'héritier de Montdargue, fait la Dame en gloussant élégamment. Je dois aussi vous remercier pour cela : vous m'avez été d'une précieuse aide.
C'était d'ailleurs cet événement qui avait poussé Yolande à s'intéresser d'un peu plus près à la Douce de Venise et à l'inviter aujourd'hui.
" Permettez-moi encore de vous remercier d'avoir accepté mon invitation, Mademoiselle di Cavallieri. Ce n'est pas tous les jours que nous autres nobles pouvons profiter d'un simple moment à prendre le thé, et c'est bien dommage."
Beata lui avait souri, tout à son bonheur de rendre enfin visite à quelqu'un. Non pas que les Pastore l'ennuie, mais être tout simplement ailleurs lui faisait le plus grand bien.
"C'est moi qui vous remercie Dame de Longroy. Votre demeure est charmante. Profitons donc de ce simple moment pour nous connaître d'avantage."