Sur la piste d’un suposé hérétique depuis le petit jour l’héritier de Montdargue et les deux hommes qu’il avait embarqué dans sa petite traque journalière s’était rapidement trouvé dépassé et le sport n’en avait été que plus appreciable. Si le jeune seigneur Frambault avait tout d’abord apprecié la ferveur et l’envie de vivre du maraud qui avait rendu la traque d’autant plus interessante, les tours de passe-passe et les astuces du pauvre bougre ne faisait que renforcer l’idée qu’il était un sorcier et agrementait l’impatience de l’héritier.
Un bon fuyard, voilà simplement ce qu’était le traqué. Mais l’Inquisition - et Frambault - avaient-ils déjà été juste?
Les heures passaient à un rythme epuisant, voilà maintenant que le debut d’après midi montrait le bout de son nez et les trois membres de l’Inquisition semblaient avoir perdu la trace du « sorcier », de quoi rendre très irritable le Limier. La rage était telle que le jeune seigneur avait été plus que capable de désigner de la patte le premier venu et l’avait accusé lui aussi de sorcellerie.
- C’est une évidence mes braves! Ce sorcier s’est grimé en un autre! Avait-il justifié son geste alors qu’il avait laissé courrir la nouvelle victime comme il était d’usage de faire à la chasse. Le jeune Limier s’était - après vingt respectables minutes d’attente - lancé sur la piste de l’animal. Il n’avait aucune chance avec un héritier gonflé à bloc et deux membre de l’Inquisition qui n’avaient définitivement pas envie de perdre leur journée.
L’idiot n’avait pas du tout le même comportemebt que le premier traqué. Il s’était réfugier, queue entre les jambes selon Frambault, dans le labyrinthe qu’était les rues de Paris. La piste - aussi courte avait-elle était - avait mené la petite escouade devant une noble devanture d’un mauvais goût indéniable si l’avait de Frambault avait été demandé. Le Salon de Yolande de Longroy. C’était l’occasion parfaite de leur rappeler une énième fois qu’ils n’étaient rien d’autre que des bâtards et des roturiers. Un léger sourire esquissé au coin de la babine, l’héritier de Montdargue était entré avec son petit groupe sans même prendre le temps essuyer leurs pattes, vraisemblablement marquées par la longue traque matinale.
- Alors, où le cachez-vous? Avait-il demandé en entrant, avec le faux calme qui le caracterisait si bien, les crocs grinçants les uns contre les autres.
- Il n’est pas dans votre intérêt de contrarier l’Inquisition! Avait-il ensuite menacé l’audiance alors que ses gardes - en bons chiens - avait appuyé ses dires en dévoilabt leurs crocs.
Frambault était certe un imbecile impulsif mais pas au point de ne pas se rendre compte qu’il dépassait de loin les limites de la bienséance. La rage de devoir laisser filer entre ses griffes l’hérétique - si jamais il en avait eu un - n’avait d’égale que la grande deception qu’avait Frambault à s’accepter vaincu cette fois-ci.
Toutes ces mégères n’étaient à ses yeux qu’une bande de femelles dont les menstruations les rendaient surement très succeptible et peu tolérantes du saint code qui regissait le royaume et la cité de Paris. En toute objectivité biensure.
Le Roy de l’inquisition avait grimacé devant les clientes et avait penché l’encolure vers l’avant, courbant presque l’echine.
- Soit... Il aurait presque ajouté une derniere menace avec ceci, mais bien rapidement il s´était consolé avec une nouvelle idée. Il allait se rendre à la bibliothèque, non pas pour s’y instruire mais bien pour aller mettre son museau là où il serait amusant de le mettre - du moins pour lui -.
« - Eh bien, je laisse à ces dames leur moment de détente, tant qu’elles peuvent encore en profiter. » Il avait marqué une courte pause pour lancer un dernier regard à l’italienne: « L’Inquisition vous remercie pour votre honnêteté, Dame di Cavallieri, puisse le Créateur vous assurer prosperité. » Ce n’était que simple formule de politesse. Puis venait un dernier regard à l’attention de la propriétaire des lieux.
- Je ne vous remercierai pas pour votre « coopération » biensure, mais puisse notre Créateur avoir pitié de votre pauvre âme.
Depuis qu’elle avait quitté Venise, pas une seule fois Beata n’était parvenue à trouver quelqu’un capable de s’occuper correctement de ses boucles blondes comme le faisait sa camériste. Cette dernière n’avait pu la suivre et depuis, la Douce avait cherché les meilleurs services et les meilleurs soins: on lui avait alors parlé du salon de Dame Yolande de Longroy et elle avait décidé de s’y rendre.
Là-bas, on l’avait accueille et dorlotée, prenant grand soin d’elle et de ses fameuses boucles. Elle appréciait toutes les petites attentions qu’on lui portait et Dame de Longroy était tout à fait charmante et cultivée: Beata, qui ne l’avait que très brièvement aperçue depuis son arrivée dans cette Cité, était très intriguée par cette personnalité de la Noblesse de Paris. Les soins et la bonne odeur de parfum étaient en train de la faire sombrer dans un état de somnolence, jusqu’à…
… et bien jusqu’à ce que Frambault de Montdargue fasse irruption comme un forcené dans le salon.
“Alors, où le cachez-vous?”
Une discussion musclée s’était engagée entre le Roy de l’Inquisition et Dame de Longroy, remettant en cause la bonne foi de la tenancière du lieu. Le de Montdargue était persuadé qu’un hérétique se cachait par ici.
Beata avait écouté d’une oreille attentive l’échange, maudissant l’Inquisition et Frambault. Il était révolté et anxiogène mais Dame Yolande lui tenait tête avec fermeté. Elle ne pouvait que la bénir d’avoir dans ses bagages un tel caractère, qui permettait de tenir le Forcené de l’Inquisition presque tranquille. Ce dernier s’était d’ailleurs mis à faire le tour de la salle, en passant devant chaque cliente: l’Italienne avait soutenu son regard sans sourciller.
“Ces honnêtes gens ne sauraient mentir à l'Inquisition, à l'Église, à notre bon Créateur donc. Qui donc ici aurait quelque chose à m'apprendre?”
Le poil de la Douce s’était légèrement hérissé à son échine lorsqu’il avait parlé du Créateur: lui Frambault, vaste plaisanterie en matière d’honnêteté quand à sa foi, remettait la sienne en question ? Les autres clientes du salon avaient semblé mal à l’aise mais n’avait rien dit. Beata s’était levée et s’était approchée d’un pas lent vers Dame de Longroy et l’énergumène de l’Inquisition.
“Allons sire de Montdargue, je puis vous assurer que personne n’est entré ici avant vous et que je suis la dernière personne à avoir franchi les portes de ce salon avant cela, il y a bien une heure. Ai-je l’air d’une hérétique messire ? Et oserai-je mentir au Créateur omniscient ? ”
Beata souhaitait que le furibond roy s’en aille, que l’atmosphère se détende. Elle voulait profiter des soins qu’on lui prodiguait ici et que tout le salon retrouve sa quiétude et son insouciance, qui avaient été balayés par l’arrivée du Forcené.
La bibliothèque n'est-ce pas? Frambault ne manquerait pas d'y jeter un oeil puisque l'invitation était si alléchante. En attendant il était dans ce salon de coiffure avec une seule envie: retrouver le fuyard hérétique. Tout ce qu'avait pu dire la Dame de Longroy jusqu'à présent n'avait fait que passer comme du vent entre les deux oreilles de l'héritier - comme beaucoup de chose d'ailleurs -. Son regard était vide, totalement vide mais soudain il s'était illuminé de nouveau quand l'ainée avait enfin eu fini de faire la leçon.
- Très interessant. Pour faire mine de ne pas avoir perdu le fil c'était ce qu'il avait dit. J'irai faire un tour dans votre bibliothèque, ne vous inquiétez pas. Avait-il affirmé pendant qu'il s'était remis aux cherches, la truffe collée sur le sol. Il s'était tourné vers un client en marquant l'arrêt. Et si l'hérétique était caché parmi eux? L'idée venait de lui traverser la tête et ne lui semblait pas si loufoque que ça. Ses paupières étaient venues se plisser et son regard ne lachait maintenant plus l'assemblée de clients qu'il scrutait méticuleusement. Sa queue avait fouetté l'air et ses oreilles se dressaient lentement haut dessus de son crâne - du moins comme il était possible de le faire avec ce genre d'oreilles -. On aurait cru voir un jeune chiot qui préparait une bêtise et ça n'allait surement pas tarder d'arriver.
Lentement et l'air de rien, surtout, Frambault s'était approché des clients et passait en les observant du coin de l'oeil. Ils avaient tous l'air normaux, c'était une orde de nobliaud en train de se faire une nouvelle coiffure, Frambault pensait d'ailleurs qu'il était bientôt temps d'aller se refaire une petite beauté.
Pour en revenir à la traque, tout ici était beaucoup trop calme à son gout. Peut-être était-ce sa venu qui avait stoppé les bonnes femmes à leurs piailleries habituelles ou bien peut-être cachait-elle quelque chose. Il était doucement entré dans un état de paranoïa. Et toutes ces ménagères qui n'aidaient en rien, cette bande de cruche écervelé qui venait se faire resserer les bigoudis. Frambault bouillonait. Il fulminait en fait.
- Ces honnêtes gens ne sauraient mentir à l'Inquisition, à l'Église, à notre bon Créateur donc. Oui, car Frambault les représentait tous. Si les de Longroy avaient une vision très différentes de l'Église et de ses dictates que l'Inquisition, ce n'était peut-être pas le cas des clients qui venaient simplement se faire une beauté peu importe qui la leur prodiguait du moment que les choses étaient bien faites. Qui donc ici aurait quelque chose à m'apprendre? Avait-il questionné à haute voix afin que l'auditoire puisse l'entendre. Yolande était une intouchable pour l'instant, mais ce n'était pas le cas de tout le monde ici et Frambault le savait bien. De nos jours l'Inquisition brûlait à tout vas et beauocup auraient été capable de dénoncer leur cousin pour s'éviter les flammes du bûcher. L'héritier en était au courant et il en jouait. Il se contenterait bel et bien d'un bouc émissaire plutôt que d'un véritable coupable.
Son haussement de ton eut l'effet escompté, mais ce fut toujours avec des yeux furibonds que Yolande observa le jeune rustre faire signe à ses acolytes de reculer. Lui-même commençait déjà à se tenir un peu mieux, comme si le cri de son aînée lui avait rappelé, quelque part dans son inconscient, les injonctions passées de ses gouvernantes de petit chiot.
Certes, le goujat ne manqua pas d'adresser une énième impolitesse à l'égard de la dame, mais celle-ci l'ignora tout bonnement, plutôt satisfaite de voir l'un des trois quitter sa boutique. Une plaie de moins, plus que deux à gérer... Elle fronça le museau en toisant Frambault, envisageant déjà d'envoyer la facture de la remise en état de sa propriété et de sa paillasse au paternel de Montdargue. Et avec les intérêts.
- Sachez ma Dame, c'est ce que je disais avant que vous me coupiez ...
Elle se retint de lever les yeux au ciel - le geste aurait été inconvenant de sa part -, mais elle le fit mille fois en pensée. Ce jeunot se prenait déjà pour un chef de famille, à prendre des grands airs et à lui parler de cette façon ! Mais son visage resta de marbre, hormis pour les éclairs de son regard adressés au sous-fifre que Frambault venait d'envoyer commencer l'enquête... une enquête bien vaine d'ailleurs, et qui allait leur faire perdre leur temps à tous.
- Sachez, je disais, que ceux qui sèment la zizanie et dérangent vos petits commerce sont ces sorciers qui arpentent nos rues et effraient nos plus jeunes et nos aînés. L'Inquisition met un point d'honneur à ce que nos bons citadins soient protégés de cette vermine qui va à l'encontre des préceptes de notre Créateur, ces âmes damnées qui pensent pouvoir agir et menacer nos fils et nos filles sans aucune retombée.
Et voici qu'il repartait dans ses longs discours... Un tissu d'inepties aux oreilles de la de Longroy. Mais qui était le plus à blâmer ? Frambault, ce jeune crétin tout juste bon à suivre bêtement des préceptes qu'il ne comprenait pas lui-même ? Son père, assez sot pour élever sa progéniture dans un environnement si abêtissant ? Le Clergé ? Oui, le Clergé, sans doute. Yolande avait beau ne pas porter les de Montdargue dans son cœur, elle reconnaissait sans mal que Frambault avait au moins le mérite d’œuvrer pour ce qu'il croyait juste. Il était clair à l'entendre parler qu'il croyait dur comme fer à tout ce qu'il affirmait, et qu'il pensait réellement sacrifier ses journées pour le bien du peuple - pas comme le Clergé qui, souvent, créait ces mensonges dans le seul but de manipuler la populace et de s'enrichir sur son dos.
Frambault eût-il été moins naïf... il aurait sans doute pu devenir quelqu'un de bien. Si seulement il avait su se tourner vers une plus juste cause... Mais il n'en restait pas moins un gamin bête et ingrat - et l'entendre parler de fils et de filles de cette façon manqua de faire glousser Yolande. Lui qui rechignait tant à prendre épouse et à donner des héritiers à sa famille... Savait-il seulement de quoi il parlait ?
- J'ai cru comprendre que vous lisiez beaucoup, si j'en crois cette grande bibliothèque que vous avez fait construire en tout cas. Il y a beaucoup de livres là-dedans, certains ne doivent pas être très canisthiques.
Elle haussa un sourcil, dubitative. Qu'insinuait-il par là ? La bibliothèque n'était nullement privée et tout un chacun avait le droit de venir s'y instruire gratuitement. Évidemment qu'elle était remplie de livres, c'était un peu le but de la chose.
- Où cachez-vous l'hérétique ma Dame de Longroy? Vous avez la chance de pouvoir vous éviter le bûcher pour l'instant puisque vous êtes influente et avez de l'argent, mais votre hérésie: vos livres et vos enseignements diaboliques auront bientôt raison de votre statut.
Elle le toisa de haut, soutenant son regard sans sourciller. Frambault était bien audacieux de l'accuser ainsi devant le public de commères qui assistait au spectacle. Mais il n'était pas le premier à lui chercher des noises, et ne serait guère le dernier - le jeune chasseur ne restait, au fond, qu'un chien parmi tant d'autres. Noble ou pas, de Montdargue ou pas, Limier de l'Inquisition ou pas... Yolande ne faisait pas de différence. Elle mettait un point d'honneur à traiter chaque accusateur de la même façon - car s'il y avait bien un sujet sur lequel elle était sensible, c'était tout ce qu'elle avait bâti avec Milet. Sa famille, ses enfants, sa bibliothèque... Frambault ne connaissait rien des valeurs d'une dynastie : fils d'une famille influente depuis des générations, il n'avait eu qu'à ouvrir la gueule pour que l'or y tombe. Ce n'était pas son cas. Les de Longroy étaient en plein essor, ils construisaient encore leurs fondations. Et Yolande, en mère de famille, ne laisserait jamais quiconque tenter de les ébranler.
- Faites attention à ce que vous dites, Frambault. Vos accusations sont graves, et ne devraient pas être dites avec autant de légèreté. A force, certains risquent de penser que vos jugements sont aussi volages que votre parole...
Le gamin s'emportait vite et maîtrisait rarement ses mots. Voulait-il vraiment se mettre le peuple à dos ? Le bûcher ou la pendaison de trop était si vite arrivé... et même l'Inquisition serait bien désarmée devant le tout-Paris en colère. Si Frambault continuait sur cette voie, il ne serait bientôt plus pris au sérieux par personne - et Yolande ne cachait nullement qu'elle-même lui accordait bien peu d'importance.
- Mais à l'entente de ce que vous dites, je suppose que vous n'êtes guère habitué à côtoyer les lieux de savoir ? Ma bibliothèque est ouverte à tous, et je vous invite à aller y lire quelques ouvrages si le cœur vous en dit... et si vous réussissez à les comprendre... ajouta-t-elle à demi-mot, mais assez fort pour être entendue. Lui avait-on seulement appris à lire ? Vous êtes libre de vous faire votre propre avis, Frambault, reprit-elle sur son ton de départ, mais ne parlez pas de choses que vous ne connaissez pas. Seuls les enfants se comportent de la sorte.
Était-ce dangereux de l'inviter ouvertement à fouiner du côté de la bibliothèque ? Yolande jugeait que non, car l'Inquisition et le Clergé ne tarderaient pas à s'en mêler - autant crever directement l'abcès. La dame n'avait rien à se reprocher, car aucun livre accessible au public ne contredisait clairement le Canisthisme. A tous les coups, Frambault se perdrait dans les rayons, lirait quelques pages piochées au hasard, s’ennuierait bien vite et abandonnerait pour aller courir des lapins ! Ceux-là étaient décidément les seuls adversaires à sa taille.
- Quelle mouche vous a piqué, Frambault ? Le jeune adulte avait tiqué et l'espace d'un instant il s'était retrouvé ébêté, la babine coincée sous sa canine et alors qu'il cherchait autour de lui la confirmation que la vieille bourgeoise lui adressait bien la parole. De plus, elle s'était lancée dans une leçon de morale comme les mères savaient si bien le faire ce qui n'avait pas manqué de dérouté Frambault qui ne s'attendait pas à ce genre de réaction.
- Sachez M- Mais sa phrase avait été coupée nette alors que la bonne mère bourgeoise avait repris la parole pour donner son autorisation à Frambault d'enquêter; Les nobles ne s'écoutaient pas, ils parlaient pour eux-même c'était bien connu. Du moins c'était ce que Frambault ne cessait de dire. L'autorisation avait d'ailleurs été ponctuée d'une incroyable saute d'humeur qui avait fait bondir les trois inquisiteurs sur leurs quatre fers. Ce crissement strident qu'avait été l'avertissement de cette bonne Yolande de Longroy n'avait pas manqué de faire grincer des dents l'héritier - l'un d'eux - de Montdargue.
Mais il s'était prêté au jeu et d'une patte nonchalante avait repoussé son ami vers l'arrière, en direction de l'entrée de la boutique, et n'avait pas manqué d'en profité pour y essuyer sa patte.
- Allons mon bon Hermant vous n'avez donc aucune tenue? Cette vieille Dame est déjà au bord de la crise, n'allez pas lui salire sa paillasse... S'était amusé à ordonner Frambault à son équipier tout en adressant une pique à l'épouse de Longroy. Le dit Hermant avait suivi les conseils de son Roy et était même sorti du salon pour mener sa petite enquête à l'exterieur et contrôler d'un coup d'oeil qui entrait et sortait.
- Sachez ma Dame, c'est ce que je disais avant que vous me coupiez ... Avait-il fait remarqué bien rapidement pendant que d'un geste de la patte il avait envoyé son deuxième équipier faire le tour de la boutique.
- Sachez, je disais, que ceux qui sèment la zizanie et dérangent vos petits commerce sont ces sorciers qui arpentent nos rues et effraient nos plus jeunes et nos ainés. Il avait commencé lui aussi son investigation, la truffe plantée sur le sol. L'inquisition met un point d'honneur à ce que nos bons citadins soient protègés de cette vermine qui va à l'encontre des preceptes de notre Créateur, ces âmes damnées qui pensent pouvoir agir et menacer nos fils et nos filles sans aucune retombé. Son regard naviguait dans le salon à la recherche d'un indice quel qu'il soit, son museau s'était plissé alors qu'il s'apercevait peu à peu qu'il n'avait rien à se mettre sous la dent pour accuser l'épouse de Milet d'un quelconque mal.
- J'ai cru comprendre que vous lisiez beaucoup, si j'en crois cette grande bibliothèque que vous avez fait construire en tout cas. Il y a beaucoup de livre la dedans, certains ne doivent pas être très canisthique. Le voilà qui s'était mis à tourner autour du pot pour finalement en venir aux faits;
- Où cachez vous l'hérétique ma Dame de Longroy? S'était-il redressé en plantant son regard ambré dans celui de la propriètaire du salon. Vous avez la chance de pouvoir vous éviter le bûcher pour l'instant puisque vous êtes influente et avez de l'argent, mais votre hérésie: vos livres et vos enseignements diaboliques auront bientôt raison de votre statut. Il s'était pincé la langue sur ce dernier mot; Ils n'étaient rien d'autre que des bâtards anoblis, des erreurs au sang sale qui s'étaient permi de se hisser au plus haut parce que feu ce bon roi Lubin n'avait pas su se contenter de son épouse, la reine.
- Alors, où le cachez-vous?
Elle toisa les trois malappris, les crocs serrés dans une expression agacée qu'elle peinait à cacher. Comment osaient-ils ?! Débarquer de cette façon dans son respectable établissement, déranger son travail ainsi que ses clientes et tout salir avec leurs sales pattes pleines de boue ! Et ces gens-là se croyaient mieux que des paysans ?
Fière, Yolande s'était instinctivement placée aux premières loges, entre les trois intrus et ses chères clientes qui se faisaient tranquillement toiletter avant cette ignoble interruption. Comme pour les protéger et interdire à ces rustres de faire un pas de plus, et donc de salir davantage le sol encore si immaculé quelques minutes plus tôt.
- Il n’est pas dans votre intérêt de contrarier l’Inquisition!
Si elle s'était jusque-là contentée de les toiser avec hargne, Yolande réagit cette fois au quart de tour. Personne - personne - ne montrait les crocs dans son salon.
- Quelle mouche vous a piqué, Frambault ? fit-elle sur le ton presque maternel d'une mère grondant un fils un peu trop dissipé. Nul doute que le rejeton de Montdargue détesterait ça. Depuis quand débarquez-vous ainsi chez les honnêtes gens ?
Depuis toujours, malheureusement... pensa la dame en réprimant un soupir. Pourtant, elle continuait obstinément à assurer que Lambert avait mieux élevé ses fils que ça et que l'attitude de Frambault empirait de jour en jour. Et voici qu'il apportait la preuve de ses ragots devant l'auditoire le plus opportun pour l'occasion ! Nul doute que les radoteuses occupées à se faire couper les poils n'en rataient pas une miette et auraient tôt fait de conter l'incident à qui voulait - et ne voulait pas - l'entendre.
- Cela ne vous suffit pas de semer la zizanie dans toute la ville ? Il faut en plus que vous dérangiez les petits commerces ?
En effet, la panique générée par la course-poursuite avait fait bien plus de bruit que nécessaire... Quant au commerce, petit n'était pas exactement le mot le plus approprié, mais passons. Ça sonnait mieux comme ça. Si ça ne tenait qu'à elle, Yolande les aurait déjà fichu tous les trois à la porte - mais, comme Frambault l'avait si bien précisé, contrarier l'Inquisition n'était dans l'intérêt de personne. Pourtant, l'idée saugrenue d'engager des hommes de patte pour monter la garde devant son salon afin que ce genre d'incident ne se reproduise plus passa un instant dans son esprit.
- S'il s'agit encore d'une de vos enquêtes, alors faites ! Mais ayez l'obligeance de faire votre travail en respectant les bonnes mœu--ET JE VOUS INTERDIS DE FAIRE UN PAS DE PLUS, VOUS ! finit-elle d'un ton suraiguë en fixant un des acolytes du jeune bourgeois qui s'approchait dangereusement d'un tapis de lin.