Les ruelles de Paris n’étaient plus certaines. La vermine pullulait, s’étendant telle la nécrose d’une gangrène mortelle et voilà bien des jours que Theobald errait.
Trop anxieux à l’idée de guider le malin au sein de leur cœur, il avait fui la ville et ses entrées secrètes.... Jusqu'à ce qu'une occasion se présente à lui.
De retour à la tanière, les sacoches pleines de merveilles de la forêt, il avait retrouvé père, prêtresse, frères et sœurs et son coeur s'était alors allégé, mais pour peu de temps. Mama Illfada avait reçu de la visite en son absence, et pas de n'importe qui ; celle d'un italien qu'il connaissait bien, et à qui il avait autrefois promis de veiller sur sa bonne guérison.
Quelle déception faisait-il. Mais malgré les remords amers qui l’avaient envahi à la pensée qu’il puisse avoir fait faux bond à Eusebio, il avait décidé de se rendre aux faubourgs, ne serait-ce que pour s'excuser.
Et quel long chemin ce fut.
❝ ... ❞ La babine inférieure malmenée par un trop plein d'anxiété, Theobald se présenta sur le palier de la maison familiale. Il n'y avait plus qu'à frapper. Hors... Plus se remémorait-il sa promesse, plus ses pas avaient-ils bifurqués vers la grange, lentement mais surement. Ses espérances étaient probablement vaines, mais il ne pouvait s'empêcher d'y croire. Croire qu'il serait là. ❝ ... Eusebio ? ❞
Il appela avec douceur, faisant retomber sa sombre capuche sur ses épaules. Silence. Du regard, il scrutait l'entrée et s'avança même de deux ou trois pas, ses yeux étincelant d'espoir mais le coeur serré.
Les Forces de la Terre lui auraient-elles donc enlevé toute confiance, ou était-ce là la vision d'un grand brun contrarié qui lui pesait autant ? Peut-être les deux, qui sait. Le bohémien s'était finalement arrêté au coeur de la bâtisse ; là où ils s'étaient donnés rendez-vous.
Un soupir lui échappa, et il laissa ses paupières se clore quelques instants.
Oh, voilà qu'on en arrivait aux menaces, fort bien ! Joignant son rire à celui de Theo, le paysan enregistra dans un coin de sa mémoire cette petite promesse d'une revanche, histoire de ne pas trop être surpris quand celle-ci viendrait... même si il ne se faisait guère d'illusions à ce sujet, très certainement que dès le lendemain, il aurait tout oublié.
Mon cœur, c'était sûrement destiné à le taquiner en retour ou à le faire fondre, et ça fonctionnait à merveille. Grisé, le jeune loup se sentit des papillons dans le ventre et se hâta de suivre le bohémien, se collant à lui dès qu'il le pouvait. Ce n'est que lorsque les hauts bâtiments de pierre apparurent derrière les arbres qu'il consentit à s'éloigner de Theo, tâchant d'afficher bonne mine malgré tout. Son amant lui promit une réunion proche, à laquelle il répondit par un vigoureux hochement de tête et un sourire enfantin.
- Prends soin de toi, Theo.
Il ne le quitta pas des yeux, jusqu'à ce que la silhouette du brun soit hors de portée. Alors, il poussa un bref soupir, mais secoua la tête pour ne pas se laisser abattre. Bientôt, ça arriverait vite, alors pas question de se morfondre ! De toute façon, il y avait beaucoup de travail pour s'occuper d'ici-là, alors autant s'y remettre.
C'est d'un pas guilleret que le Gianotti reprit le chemin de la ferme, rêvant d'un avenir où il serait heureux avec Theo... sans apercevoir les nuages qui s'amoncelaient au-dessus de leurs têtes.