L'après-midi était maintenant bien entamée. Sa matinée était passée tellement vite en la présence des loups qu'elle avait perdu un temps fou sur son emploi du temps. Heureusement, elle pouvait compter sur les capitaines de ses trois navires et leurs marins. Ils avaient anticipé et avaient débuté les réparations sur les bateaux. Ces derniers devaient être nickel pour leur départ dans un mois.
Sa hâtant, la jolie dame abandonna ses petits frère et soeur et trottinant jusqu'aux pontons où étaient amarrés les géants de bois. Là elle embarqua sur l'Aélais pour voir où ils en étaient. C'était le bateau qui avait le plus souffert. Sur le chemin du retour la coque était entrée en collision avec un objet quelconque traînant dans la mer et le bois s'était fissuré, assez pour que l'eau rentre. Des cordes s'étaient également effilochées, les voiles s'étaient déchirées... Non, il n'était pas en bon état, il allait falloir racheter pas mal de matériel pour le remettre en bon état.
- C'est bien messieurs, vous avez fait du bon travail ! Continuez comme ça !
Elle mit également la patte à la pâte, rangeant les cordages, tonneaux, pliants les voiles... Le navire devait être propre pour qu'ils puissent tout réparer sans être encombrés.
Angélique attendait maintenant la visite d'un certain Antonito Pastore. Un membre de la famille qui employait les Gianotti donc. Elle avait hâte de savoir de quoi il voulait lui parler. Il n'était pas rare qu'on vienne la chercher pour lui passer une commande mais il était plus rare qu'un chien d'une aussi grande importance se déplace en personne. Avait-elle commis quelque chose de mal ? Ou plutôt... aurait-il eu vent de ce qui pouvait se tramait la nuit au Port..?
La chienne reconnut le personnage immédiatement. L'élégant chien était d'ailleurs escorté, c'était ça qui lui avait mis la puce à l'oreille. La viverrin se hâta donc de descendre de son navire pour accueillir proprement le noble canidé.
- Bien le bonjour Seigneur Pastore. Je suis Angélique de Saintance, je suis ravie de vous accueillir en ces lieux Monseigneur.
Elle lui fit un sourire chaleureux. Il n'avait pas l'air méchant, mais elle se doutait bien que ses yeux verts d'eau pouvait rapidement devenir aussi sombre que la mer en pleine tempête...
" Bien sûr, magnifique! Je vous attend ici! " Acquiesçant, le Pastore s'assit. Sa queue en plumeau dansant de gauche à droite. Les pattes sur les yeux, tel un chiot, Antonito attendit la surprise.
[la suite au Fort des Pastore! ]
Antonito était l’élégance incarnée. Angélique ne pouvait s’empêcher de trouver le chien magnifique. Il avait la prestance d’un roi. A côté elle faisait tâche. Et lui, il faisait tâche dans ce décor de barbare. Mais elle en oublia bien vite son physique lorsqu’il lui apprit qu’elle commençait à se faire bien connaître en ville. Ses joues en rosirent presque de plaisir. Il était vrai que les affaires marchaient plutôt bien pour elle en ce moment. Le mâle continua sur sa lancée, changeant de sujet, lui posant une question et avant même qu’elle ne puisse répondre se perdit un peu ailleurs…
Elle ne voulait pas l’ennuyer avec la mort de son père donc elle passa cette situation sous silence, attendant avec empressement, la suite de son discours. Elle voulait absolument savoir le pourquoi de sa venue. Mais il la surprit bien plus encore avec une proposition des plus étonnantes ! Elle ?! Invitée chez les Pastore. C’était un tel honneur… Elle n’avait encore jamais pénétrée dans aucune des grandes maisons de la ville.
- Ce serait un réel honneur pour moi Seigneur Pastore…
Elle en avait presque le souffle coupé. Elle commença même à paniquer en réalisant qu’elle n’était point toilettée pour marcher aux côtés d’Antonito et encore moins pour pénétrer dans sa grande demeure. De plus, elle n’avait aucun cadeau à lui offrir…
- Puis-je me permettre de vous soumettre une requête mon Seigneur ? Ce n’est pas grand-chose mais… accepteriez-vous que j’aille enfiler une toilette afin d’être plus présentable ?
Ressembler à une souillon et nuire à la réputation du grand chien était bien la dernière chose qu’elle souhaitait.
En effet.
Aux premiers pas sur les quais, la voix mielleuse s'extasiait sur tous les éléments du bateaux avec une candeur limite exagérée. Cependant, aux vu de son visage scintillant, Antonito semblait réellement conquis par le bâtiment et son équipage. Sa voix grimpa d'un bond lorsqu'il vit leur capitaine.
" Dio mio ! " Il se rapprocha de la petite dame, abaissant le nez à son niveau afin de les mettre tout deux sur un même pied d'égalité.
Sa garde le suivant comme son ombre, les deux chiens armées conservèrent leur visage impassible qui contrastait totalement avec le visage bienveillant de leur employé. " Eh bien, le sentiment est partagé, il me tardait de vous rencontrer ! Une véritable légende ! Mais dites moi, " Sa bouche se pinça de réflexion. " Angélique, Angélique. Est-ce français ? Je suis sûr d'avoir déjà entendu ce nom quelque part. " Il reprit son sourire. " Enfin peu importe ! Votre bateau, quel navire. Il semble avoir beaucoup guerroyé. Depuis combien de temps voyagez-vous ensemble ? " Les histoires de marins, il pouvait en écouter par centaines. Près d'une tasse, d'un verre ou avant d'aller dormir. Son imagination débordante parvenait parfaitement à lui illustrer la mer et les monstres aquatiques qu'elle dissimulait. " Oh! Mais où sont mes manières ! Voulez-vous que nous discutions dans un endroit plus privé ? Le bureau annexe de mon père n'est pas loin. Ou encore mieux, puis-je, en mon humble nom et titre, vous inviter vous Grande écumeuse à séjourner dans mon Fort ? " Un temps. " En toute amitié, bien entendu. " s'empressa-t-il d'ajouter, s'inclinant légèrement et retenant un rire.