Ce matin là, le bohémien s'était décidé à visiter le salon de Dame Yolande. Krismund n'y était jamais allé, mais il en avait beaucoup entendu parlé, en bien, naturellement. Dame Yolande de Longroy était connu pour être une femelle charmante et distingué, cultivé de surcroît et la famille était bien connu pour s'être séparé de l'Église, tout ce que Krismund pouvait apprécié. Généralement, Krismund s'entretenait seul, ou à la rigueur, demander à des amis bohémiens. Mais aujourd'hui, il souhaitait aller dans ce salon si réputé de Reign. Était-ce pour montrer que même les Bohémiens pouvait se refaire une beauté dans ce salon ? Il ne savait et ne se posa pas la question.
Krismund rassembla l'argent qu'il avait mis de côté, enfila sa cape en cuir fatigué et sortit de son antre. C'était le petit matin, le soleil embrasait les hauts des bâtiments. Ses yeux glacés se posaient tour à tour sur les chiens de Reign, il ne conaissait pas la plupart, ou alors, seulement de vue. Vous savez, les bohémiens ne sont pas l'exemple même des lèves-tôt. Et outre les bohémiens, pas grand monde ne l'appréciait. Bientôt, la géante carcasse se tenai désormais devant le somptueux salon de beauté des Longroy.
Il était ouvert depuis 1 heure environ, mais déjà, il y avait de nombreux clients dans l'institut. Krismund était impressioné. Le mâle s'avança prudemment et ouvrit la porte. Soudain, il fut agressé par des odeurs qu'il n'avait pas l'habitude de sentir venant de toute part. Il regarda le salon dans son intégralité puis ferma doucement la porte derrière lui. Il s'essuya les pattes consciensieusement avant de marcher sur le beau carrelage reluisant du salon. Pendant un instant, toutes les têtes se tournèrent vers lui, jaugeant le nouveau venu d'un mauvais œil, un juste d'un regard curieux, peut être. Krismund était debout et cherchait la maîtresse des yeux. Il lui semblait bien que c'était Dame Yolande elle-même qui accueillait les clients. Bien vite, il la vit. Il s'avança légèrement et la salua ;
- Bonjour, Dame Yolande de Longroy, dit Krismud d'une voix polie. Permettez-moi de vous complimenter sur la beauté de votre salon. Je n'étais jamais auparavant, mais les rumeurs disaient vrai, le sublime de votre salon n'a d'égale que sa propriétaire.
Les compliments avaient toujours été le fort de notre beau chien. Il adorait parler, même le sourire n'accompagnait à présent plus ses dires. Le cœur, cependant, y était toujours. Et quoi qu'on puisse en penser, le bohémien était sincère dans ses paroles.
- Je ne suis pas venue ici pour me faire une mise en beauté ou un soin en particlier, que pouvez-vous conseiller à un vieux comme moi ?
Il jeta un œil furtif autour de lui. Il ne savait pas où posait sa veste en cuir.
Dès lors que Krismund avait passé la porte du salon de haute renommé, une jeune chienne avait prit peur et s'était enfuie à toute patte dans l'arrière boutique. Quelques secondes plus tard, la belle Yolande apparut et se dirigea vers Krismund. Le mâle put remarquer le coup d’œil qu'elle jeta à son employée. Il aurait dire à Dame Yolande que la réaction de Perrine était tout à fait compréhensible et qu'il y était habituée, cependant, il fut coupé par le rire cristallin de la maîtresse de maison.
- Vieux ? Je vous en prie, ne vous diminuez pas de la sorte ! Nous ne sommes guère si âgés, vous et moi.
Krismund esquissa un léger sourire à ses paroles. Il hocha la tête, comme pour remercier la femelle de son soutien.
- Perrine, ayez l'obligeance de vous occuper du vêtement de notre hôte. Monsieur Mavlaka va rester avec nous quelques heures.
Krismund se tourna vers la jeune chienne qu'il avait malencontreusement effrayé quelques minutes plus tôt. Il se débarrassa de sa veste. et la tendit à l'employé tout en la remerciant.
- Et toi, file chez le ferronnier ! Il devrait avoir réparé mon carillon - et n'oublie pas de récupérer la monnaie ! cria-t-elle après le mioche qui partait déjà au petit galop. Il me doit trois deniers, pas un de moins !
Le petit passa près de Krismund et le salua. Le patriarche esquissa un large sourire à l'enfant. Il le connaissait, c'était un bohémien. Chaque soir, dans l'ombre des ruelles, il le voyait, joyeux et vif. Derrière ce sourire, pourtant, se cachait une grande tristesse ; ses parents avaient tout deux étaient attrapés par l'Inquisition. Sa mère avait été brûlé vive le même jour que Lizbeth, et son père, personne ne l'a jamais revu. Les bohémiens s'entraidaient entre eux, mais ils n'étaient pas assez riches pour subvenir aux besoins de tout le monde, alors, chacun travaillaient de son côté. Comme ce gamin.
Et quel travail ! Un travail chez Dame Yolande dans le plus beau salon de Paris. Cela en enragerait plus d'un ... comme un Montdargue.
- Pardonnez toute cette agitation, mon bon monsieur, reprit-elle en se tournant vers l'intéressé. Je ne sais pas ce qu'il se passe ce matin, mais nous n'avons pas une minute de repos !
- Je vous en prie Ma Dame, tout est parfait, répondit Krismund avec calme et sérénité.
- Quant à votre cas... fit-elle en laissant sa phrase en suspens. Hmm... reprit-elle, pensive. Il faudrait surtout travailler à détendre ces muscles.
Krismund hocha la tête. En effet, c'était plutôt un bon choix. Krismund n'avait plus personne à séduire, être beau n'était certainement pas sa priorité, cependant, détendre ses lourdes épaules étaient une priorité que Dame Yolande vit rapidement.
- Avec plaisir.
La propriétaire du salon se tourna vers un de ses employé, le seul employé mâle.
- André, veuillez préparer la grande baignoire. Nous allons utiliser... le bain aux radis.
Dès qu'il fut partit, Yolande se tourna vers le client aux largues épaules noueuses et l'invita à s'asseoir sur les fauteuils qui étaient certainement dédiés à l'attente.
- Merci, Ma Dame.
Il la remerciait, à première vue pour son invitation à s'asseoir sur ses beaux fauteuils. Cependant, son remerciement allait bien au delà. Il la remerciait pour son sourire, pour son accueil, pour son indifférence avec laquelle elle le traitait : comme un autre client, pas comme un bohémien, pas comme un vieux sac à puce. Il la remerciait d'avoir créer un salon comme le sien : acceptant n'importe quel client, et mieux encore, employant ceux dans le besoin. Il la remerciait d'avoir employé le jeune bohémien de 10 ans, car personne d'autre ne l'aurait fait. Il la remerciait pour beaucoup de choses à vrai dire.
- J'ignore si vous êtes au fait des dernières méthodes de relaxation ? Il n'y a rien de meilleur qu'un bain à l'huile de radis pour soulager les tensions musculaires ! Les nôtres viennent d'ailleurs d'une ferme que j'ai moi-même visitée - de braves paysans qui cultivent, à mon humble avis, les meilleurs produits de la région.
Krismund hocha la tête et répondit d'une voix rauque :
- Vous savez, Dame de Longroy, je ne suis malheureusement pas au courant des dernières méthodes de relaxation, mais j'ai hâte d'essayer ce bain à l'huile de radis. Dîtes moi, comment se nomme ce fermier ? J'aimerai beaucoup aller lui rendre visite. J'ai toujours adoré les fermes et les cultures. Dans une autre vie, j'aimerai beaucoup être fermier. Curieux n'est-ce pas pour un ancien soldat ? Mais les plantes et les cultures m'ont toujours fascinés. Je sais à quel point les végétaux peuvent faire des miracles.
Le terme miracle n'était peut être pas le meilleur terme. Il entendit quelques petits cris de terreurs à ces dires. Il leva les yeux au ciel. Ces vieilles harpies croyantes s'affolaient pour pas grand chose.
Krismund posa son regarde de glace sur la caniche devant lui.
- Vous semblez bien plus jeune que moi Ma Dame. Et pourtant, je vous ait toujours vu dans les rues de Paris, aussi longtemps que je me souvienne. Vous devez être un miracle de la vie, ma chère, vous semblez toujours aussi jeune qu'autrefois. L'âge vous embellit de jour en jour, tandis que c'est tout le contraire pour moi. Au vu de votre ravissante allure, j'ai du mal à croire que nous ayons le même âge. Quel est votre secret ?, demanda-t-il en laissant échapper un petit rire.
Ah, la flatterie. Krismund adorait flatter -seulement si il le pensait vraiment-. Et dans ce cas, le bohémien ne pouvait tarir ses compliments à l'égard de la femme de Longroy. Autant, le père de Longroy n'était pas un homme très avenant, autant, sa femme était une des créature les plus charmantes de Reign.
Les bruits de ciseaux coupant les fourrures étaient un fond sonore très agréable aux oreilles du mâle. Et dire qu'il avait attendu 30 ans avant de venir dans ce salon.