L'Aube venait à peine de poindre, mais Eusebio était déjà de sortie, arpentant les rues encore sombres et brumeuses de Paris. Lacri l'avait chargé d'une commission la veille, et comme il avait mal dormi, il s'était dit qu'une petite virée matinale lui ferait le plus grand bien. Sur son dos, il transportait un sac de toile résistante, visiblement lourd, et aux résonances métalliques. Dans ce dernier, on pouvait en effet trouver houes, cognées, faux, serpettes et faucilles, tout l'attirail permettant la récolte du foin et du bois dans les faubourgs. Le tout était lié en fagot et fermement maintenu dans le sac, pour éviter des accidents bêtes...
Le jeune loup était en route vers la forge de son oncle Danilo, espérant le voir déjà debout et au travail, mais pas surchargé de commandes pour la garde. Tous ces outils qu'il transbahutait avaient bien besoin d'affûtage et de réparation pour certains, et le savoir-faire unique de l'oncle était d'un grand secours dans ces cas-là... La famille de fermiers voulait être sûre qu'à l'arrivée de l'été, ils seraient parfaitement opérationnels !
Le géant arriva en vue de la forge, et avisant la fumée sortant de la cheminée, laissa un sourire soulever ses babines. Le maître était déjà à l’œuvre, avec un peu de chance il pourrait s'occuper de tout ça dans la journée... Franchissant la porte de l'atelier, le gaillard chercha du regard le concerné, impatient de déposer son lourd et encombrant chargement.
- Ola zio! C'est Eusebio, mon père m'envoie te demander une petite expertise sur nos outils... Déliant les cordes pour se libérer de son poids, il le posa sur le côté, laissant échapper un soupir. Elisio t'envoie son bonjour et Lacri renouvelle son invitation à venir manger à la maison bientôt, au fait !
L'assentiment de son oncle apparut comme un réel soulagement aux yeux du jeune loup, qui afficha un grand sourire ravi. Il serait aux premières loges pour voir comment il comptait réparer tous ces outils, et avec un peu de chance, il pourrait aider aussi ! Plein d'entrain, Eusebio suivit le forgeron dans son antre, observant ses moindres faits et gestes et tout l'équipement dont il se servait. Tant d'ustensiles, de notions précises, c'était un véritable travail d'orfèvre !
A l'idée d'avoir un outil à lui forgé par Danilo, le géant n'en put plus de ravissement, et s'approcha pour regarder comment on s'y prenait pour verser du fer en fusion dans un moule - il n'osait cependant pas venir trop près de peur d'y récolter une brûlure, se connaissant bien.
Hochant la tête à la leçon du jour, le paysan était fasciné d'admirer la matière encore liquide du métal qui se figeait rapidement, et serait bientôt assez dure pour tenir de nombreuses années.
- Combien de temps il te faut pour créer un outil ? Entièrement, je veux dire ?
Le gaillard posa ses yeux curieux sur Dan, content de pouvoir en apprendre plus dans un autre domaine que la culture de la terre. Qui sait, peut-être qu'un jour, quand la ferme serait en plein essor et qu'il n'y aurait plus besoin de lui, il pourrait se reconvertir ? Ils s'en sortaient déjà bien ma foi, mais avant que lui puisse la quitter, c'était pas demain la veille.
- Qu'est-ce qu'il faut utiliser pour rendre la lame tranchante ?
Regardant rêveusement tous les outils dont disposait le forgeron, Eusebio tâchait de deviner lesquels interviendraient pour le travail de ce matin, mais il y en avait tant de toutes formes et de tout matériaux qu'il n'avait qu'une petite idée des façonnages possibles du métal !